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Terrorisme contre communisme

L’antagonisme du terrorisme et du communisme

lundi 24 novembre 2008, par Jean-Pierre Combe

- Je mets à part des objets de cette étude l’application par le gouvernement révolutionnaire de la loi de Terreur appliquée en 1792, 93 et 94 : cette loi dépasse en effet le terrorisme, et l’analyse de la politique qu’elle a définie et mise en application est plus complexe que ne peut l’être celle des politiques terroristes ;

- nous devons observer que la politique de Terreur a bien servi la bourgeoisie révolutionnaire, et nous ne devons pas oublier que le Sans-Culottes Gracchus Babeuf, quoique n’étant pas député, l’a critiquée et s’est opposé à cette loi lorsqu’elle fut proposée au vote de la Convention.
- Il faut aussi mettre à part de cette étude les problèmes posés dès 1918 sous le nom de terrorisme par un auteur social-démocrate rénégat de la revendication socialiste, Karl Kautsky : celui-ci condamnait le gouvernement de la Russie par le Conseil des Commissaires du peuple en l’accusant de terrorisme. Rappelons très brièvement qu’en 1918, les forces réactionnaires de l’empire des tsars, militairement organisées pour la paix comme pour la guerre depuis des générations, avaient lancé contre la révolution une guerre véritablement totalitaire, avant que le conseil des Commissaires du Peuple ait pu véritablement commencer d’organiser le pays : la révolution devait faire les deux choses à la fois : organiser le pays pour la paix et faire la guerre aux armées contre-révolutionnaires qui, dès 1918, pouvaient s’appuyer sur l’aide matérielle importante des bourgeoisies au pouvoir dans les autres pays du monde ; la Russie soviétique fut contrainte à dix ans de guerre, de 1917 à 1927, contre la contre-révolution et contre l’intervention étrangère qui la prolongeait.
- En 1919, Lénine réfuta le rénégat Kautsky : il le faisait de manière à maintenir dans les peuples de Russie un haut niveau de mobilisation révolutionnaire pour les deux tâches qu’il leur fallait accomplir simultanément : l’organisation du pays pour la paix et la guerre contre la réaction des bourgeoisies du monde ; c’est ce cadre concret qui permet de définir le sens concret que prennent les mots qu’il emploie dans l’esprit de ceux à qui ils sont destinés.
- Quelques mois plus tard, Trotski rédigea une théorie pour relier le terrorisme au communisme ; quoi que l’on puisse en dire, ce texte aussi est conditionné par le moment dans lequel il est écrit.
- J’écarte donc ces textes de la présente étude parce qu’ils ne concernent pas les rapports du terrorisme au communisme, mais l’usage par le pouvoir révolutionnaire de la terreur dans la guerre que lui impose la contre-révolution.
- Je pense que les conditions actuelles de notre lutte sont telles qu’il nous faut dès à présent poser les problèmes essentiels du communisme : il le faut d’abord pour voir les pièges idéologiques que la bourgeoisie nous tend sans cesse, et l’opération policière de Tarnac, dite anti-terroriste, contient un tel piège ; il le faut aussi pour créer les conditions les plus favorables à la solution révolutionnaire des problèmes de l’affrontement décisif des forces du passé et de celles de l’humanité en progrès.
- Cela étant, de quoi s’agit-il ?
- Dans notre pays, le terrorisme s’est manifesté à maintes reprises : nous pouvons donc lire dans son histoire ses caractéristiques essentielles et principales.
- Le terrorisme est toute modalité de la politique dont la terreur est le moyen d’agir.
- Pour atteindre ses objectifs, une politique terroriste plonge les citoyens dans la peur afin que la peur elle-même modifie leur comportement politique : l’effet principal de la peur est de bloquer le raisonnement politique individuel des femmes et des hommes ; lorsque cet effet est obtenu, il a pour conséquence que citoyennes et citoyens adoptent des attitudes de protection contre la peur qui les placent hors du champ politique, laissant les terroristes y opérer librement : ceux-ci peuvent alors faire leur propre politique et l’imposer à la société contre la volonté des citoyens.
- Nous voyons là une différence essentielle qui oppose le terrorisme au communisme : la peur fait obstacle au plein exercice du droit de penser et d’exprimer sa pensée par chaque membre du peuple ; or le communisme consiste à porter du plan économique et individuel au plan politique, qui est collectif, la revendication populaire de mettre fin à la misère que la dictature bourgeoise, continuant les dictatures d’autres classes exploiteuses, impose au peuple ; le communisme fait cela en transformant la revendication économique individuelle des travailleurs et des autres victimes de la misère en une revendication politique collective élevée par la classe ouvrière et avec elle par le peuple tout entier contre la dictature de la bourgeoisie et des restes des autres classes exploiteuses.
- Mais une telle transformation ne peut avoir lieu que si elle est l’œuvre collective des individus que sont les membres du peuple :
- D’abord, elle n’est ni simple ni directe : elle est la combinaison de plusieurs transformations :

  • celle de la revendication économique individuelle en une revendication économique collective ;
  • celle de la revendication ouvrière en une revendication populaire ;
  • l’élargissement de la revendication économique en une revendication qui s’en prend à l’ensemble des deux plans économique et politique ;
  • l’expression de ces revendications sur le plan de la culture, c’est-à-dire la production des idées qu’elles portent, jusqu’à former une revendication culturelle contre la domination idéologique des classes exploiteuses.

- Ce serait une erreur de croire que ces transformations doivent se faire l’une après l’autre, dans un certain ordre : au contraire, lorsqu’elles ont lieu, ce sont des processus simultanés qui agissent et réagissent sans cesse les uns sur les autres ; en somme, ce sont des processus dialectiques, comme le sont tous les processus de la vie.
- Le développement de cette transformation complexe réalise un processus spirituel de l’être humain collectif qui se décrit en trois étapes :

  • la première est la prise de connaissance du monde, et en particulier de la société ;
  • la deuxième est la prise de conscience des mouvements actifs dans la société, qui conditionnent le devenir de l’être humain, tant individuel que collectif ;
  • la troisième est la prise de parti dans le mouvement de la société, au sein des contradictions qui se forment entre les mouvements qui y sont actifs.
  • C’est à partir de la prise de parti que l’action devient possible et efficiente.

- Il y a un ordre d’antériorité évident entre ces trois étapes, mais cet ordre n’est pas total : chacune d’elles a la possibilité de commencer avant que les précédentes soient terminées.
- On voit bien ici que la transformation que le communisme entreprend de réaliser ne peut avoir lieu que si chacun des membres du peuple, femme ou homme et quel que soit son âge, participe non seulement à l’action revendicative nécessaire pour assurer les conditions minimales de sa vie sans cesse remises en cause par l’exploitation capitaliste, mais aussi à l’effort de pensée sans lequel sa revendication individuelle ne sera pas transformée : le plein exercice par chaque membre du peuple des droits de penser, d’exprimer sa pensée et de débattre avec autrui est une condition nécessaire au communisme.
- Le terrorisme, en plongeant les citoyennes et les citoyens dans la peur, leur interdit de débattre, d’exprimer leur pensée et même de penser : par là, il entrave le communisme lui-même ; en Allemagne, l’état nazi est parvenu à inhiber presque complètement le communisme en le combattant au moyen d’un terrorisme qui a causé la mort et l’internement de la quasi-totalité des communistes.
- C’est qu’en fait, terrorisme et communisme sont incompatibles ; leur affrontement est un antagonisme : il ne peut s’achever que par la disparition définitive de l’un ou de l’autre. Aussi longtemps que les contre-révolutionnaires peuvent se servir du terrorisme, ils restent capables d’arrêter la révolution.
- Pour faire peur, les terroristes démontrent leur capacité de détruire : ils le font en commettant des attentats contre les biens matériels ou contre les personnes, par des destructions, des enlèvements ou des assassinats. Ils choisissent les objectifs de leurs attentats selon leur intention de faire peur : l’intérêt du progrès humain est totalement étranger à la méthode du terrorisme, et celui-ci est toujours entaché d’irrationnel, qui n’est jamais un facteur de progrès des rapports sociaux, et qui est un facteur favorable à la montée de la peur.

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