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La violence en bandes illégales, une longue tradition de la bourgeoisie

vendredi 17 juin 2016, par Jean-Pierre Combe

Pour désigner les bandes de casseurs à l’œuvre lors des manifestations populaires revendicatives, le terme « commando » est tout-à-fait pertinent : ces commandos sont réellement bien organisés, comme tous les commandos. Il y a une contradiction évidente avec les commentaires invoquant l’hypothèse selon laquelle ils seraient incontrôlés ; comme tous les commandos, ils sont réellement commandés et contrôlés ; la seule question est : par quel état-major ?

Historiquement, la bourgeoisie française a toujours fait un usage systématique de bandes irrégulières, armées selon les circonstances, pour protéger sa propriété et son droit de tout gérer selon le droit privé et conformément aux privilèges que ce droit confère aux plus riches : ces bandes sont irrégulières du point de vue de la constitution et des lois, mais elles sont très organisées et disciplinées à la botte des grands bourgeois qui les financent ; elles sont apparues dès les derniers mois de 1789 ; c’étaient alors des groupes de royalistes défenseurs de l’Ancien Régime, recrutées et encadrées par des aristocrates déchus, tant parmi leurs « pairs » plus pauvres qu’eux que dans le prolétariat en guenilles (en allemand : « der Lumpenproletariat »).

Au cours des trois années suivantes, leurs chefs se sont progressivement rapprochés des plus riches des bourgeois représentés à l’Assemblée constituante, puis à l’Assemblée législative, assez pour donner un sens au compromis du 5 août 1789.

Ce compromis est connu sous le nom de « décret d’abolition des privilèges », mais ce nom est illusoire : en réalité, c’est la base de l’union contre-révolutionnaire de tous les propriétaires de richesses terriennes et financières, qui allait conduire à la fusion de l’ancienne aristocratie terrienne dans la bourgeoisie riche, toutes deux s’accordant désormais à administrer tous leurs biens selon le droit bourgeois, ce qui excluait la grande masse des paysans travailleurs et des artisans, ainsi que tous les prolétaires, de l’ordre constitutionnel nouveau.

Les anciens aristocrates ont investi leurs anciens privilèges, notamment celui de « haute et basse justice », sur quoi ils fondaient leur droit de tuer, dans la conduite des bandes irrégulières contre-révolutionnaires ; ils engageaient ces bandes dans la défense violente de l’ordre grand-bourgeois comme ils avaient engagé leurs valets d’armes sous l’Ancien régime : là est l’origine profonde du fascisme et du nazisme.

Leur plus grand succès, il faut le noter, c’est d’avoir abattu la première République : pendant les deux ans qui ont suivi la convocation de la Convention nationale, alors que les défenseurs de la Révolution étaient envoyés aux frontières dans les armées régulières, ces atistocrates mobilisaient les bandes, alors dites « de royalistes », pour terroriser et tuer les membres des comités révolutionnaires de tous les départements ; parvenus à interdire leurs réunions, ils ont accompli le coup d’Etat du 9 thermidor an 2 de la République ; qui s’étonnera qu’après ce succès initial, la bourgeoisie française ait toujours, tout au long de l’histoire des dix-neuvième et vingtième siècles, maintenu à son service ce moyen de violence, et que nous retrouvions aujourd’hui ces bandes irrégulières ?

Les commandos de casseurs ne sont qu’une des formes modernes que la bourgeoisie a donné à son appareil de violence répressive, sur la base de sa longue expérience, qu’elle a élargie à toute l’Europe au cours du vingtième siècle !...

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